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Cohésion Sociale et ARS sont touchées par une lame de fond

L’interdépartementalité est à la mode. Après avoir fait l’objet d’un rapport d’inspecteurs généraux en juillet 2013, elle rentre peu à peu en application par des voies différentes d’une administration à une autre, d’un service à un autre.

En Cohésion Sociale des transferts en trompe-l’œil

Le rapport IGA/IGAS/IGJS de décembre 2015 sur les missions et l’organisation des DR(D)JSCS fait ressortir les points suivants :

  • un transfert d’activités vers le niveau départemental
  • un transfert d’effectifs à l’horizon 2018 de 239,5 ETP, dont :
    • 61,8 ETP vers la DD siège
    • 41,8 ETP vers les autres DD
    • 120,9 ETP en « interdépartementalité stabilisée en DR
  • l’utilisation d’effectifs du niveau régional pour des activités départementales : 29 domaines ont été identifiés pour « bénéficier de compétences rares, mutualiser les ressources humaines…, alléger l’échelon départemental de tâches administratives ».

En réalité, il ne s’agit que d’un affichage :

 le transfert d’activités est minime : il ne concernerait que la délivrance des agréments de service civique…

  • Par ailleurs, le rapport insiste sur la nécessité de poursuivre les transferts d’activité vers d’autres administrations prévus dans le cadre de la revue des missions et sur la possibilité de faire faire des tâches par d’autres en utilisant la délégation de gestion prévue par le décret du 14 octobre 2004.
  • le transfert total d’effectifs, en incluant l’interdépartementalité, est moindre que prévu : 239,5 ETP au lieu de 296. Il faut dire que l’injonction bureaucratique de transférer des effectifs de DR en DD ne donnait pas le mode d’emploi pour assurer des missions régionales renforcées avec moins de monde… Au total, déshabiller Pierre pour faire semblant d’habiller Paul ne constitue en rien un renforcement !
    Par ailleurs, le transfert réel d’effectifs, sans l’interdépartementalité, s’établit à : 61,8 + 41,8 = 103,6 ETP. Ce transfert, qui ne couvre même pas la baisse des effectifs entre 2011 et 2014 (187 ETP), est à rapprocher de la baisse des effectifs prévue en 2016 (87 ETP) !
  • la notion d’interdépartementalité, inséparable de celle de mutualisation des moyens, est ici trompeuse puisqu’il ne s’agit pas de mettre en commun des moyens de différents départements, mais d’un pilotage porté par le niveau régional. Mise en œuvre de la sorte, l’interdépartementalité n’est rien d’autre qu’une régionalisation qui ne dit pas son nom ! La réalité du mouvement de régionalisation est bien traduite par la création des DRDJSCS avec l’affirmation de l’autorité hiérarchique du DRD sur tous les agents.

Interrogé par la CGT lors du CTM du 6 octobre dernier pour savoir ce que recouvraient les « compétences rares », le DRH ministériel a répondu « les IASS, par exemple »… Ainsi, il serait prévu que les IASS deviendraient si rares dans les services qu’il faudrait les mutualiser au niveau de la région ?

Après être passée en force sur la réorganisation territoriale, l’administration convoque les organisations syndicales à un groupe de travail le 5 avril prochain. La CGT ne participera pas à la découpe des missions et des services ! Elle ne se rendra pas à ce groupe de travail.

Dans les ARS un même affichage trompeur sans contenu

La revue des missions initiée en 2014 avait fait sortir des cartons des projets d’externalisation de la quasi-totalité des missions de santé environnementale. Or les services concernés dans les délégations territoriales comprennent souvent la moitié environ des effectifs des délégations. Externaliser ces missions, ce serait remettre en cause l’existence même des délégations territoriales.

Ces projets ont – provisoirement – été remis dans les cartons et aujourd’hui l’affichage est le même dans les ARS qu’en Cohésion Sociale. Ainsi, lors du CNC du 1er octobre où il a été réalisé une synthèse des projets de réorganisation, une représentante de l’administration a déclaré : « Le rôle de proximité des délégations territoriales est réaffirmé avec le projet d’en recréer dans les départements, ex chefs-lieux de région, où elles n’existaient plus ».

Et on peut lire dans la synthèse des études d’impact RH réalisé par le secrétariat général du ministère : « les schémas cibles d’organisation des futures ARS font ressortir les caractéristiques communes suivantes : … -une réaffirmation et un élargissement du rôle et des missions des délégations territoriales, organisées à l’échelle des départements et dotées des ressources et compétences nécessaires à l’exercice de leur mission ».

La disparition de certaines DT dans des départements ex chefs-lieux de région se trouvait en contradiction formelle avec la loi HPST qui prévoyait explicitement une DT dans chaque département. Leur re-création n’est donc qu’une régularisation. L’appellation « délégation départementale » prévue par un décret récent vient valider cet état de fait.

Mais, précisément, comment adhérer au discours de l’administration alors qu’elle vient de faire changer la loi pour supprimer l’obligation de créer une délégation par département via la loi de modernisation de notre système de santé ? Dorénavant, l’obligation pour les ARS sera de mettre en place des délégations « dans le ressort d’un ou de plusieurs départements ».

Comment interpréter les éléments convergents de la synthèse des projets de réorganisation du 1er octobre évoquée plus haut : des missions vidées de leur contenu, réduites à un travail « d’observation », de « lien », « d’animation », de « démocratie », activités qui prennent beaucoup de temps et d’énergie mais avec quelles perspectives ? Que dire de la création courant 2016 d’une délégation territoriale « Rhône – Métropole de Lyon » ou du rapatriement de thématiques sur les sites des sièges et ex sièges comme par exemple l’offre hospitalière dans le Nord-Pas de Calais Picardie ?

Comment ne pas voir dans le non remplacement de certains délégués territoriaux après leur départ et l’intérim prolongé assuré par d’autres délégués départementaux la volonté de fonctionner en « interdépartementalité » ?

Comment ne pas s’inquiéter des allers et retours continuels des missions entre les sièges et les délégations départementales ?

Pour un vrai renforcement des échelons départementaux

Le rapport IGA/IGAS/IGJS de décembre 2015 vend la mèche en quelque sorte. Les inspecteurs s’interrogent « sur le niveau minimal des effectifs, passés pour certains départements et/ou missions, en dessous du seuil de «flottabilité ». » Et la crainte qu’ils expriment à la fin de leur rapport est révélatrice : ils font état d’une «appréhension que le processus de réforme en cours soit à nouveau modifié dans les mois ou années à venir ».

Mis bout à bout cela donne :

  1. certains départements et/ou missions sont en train de couler
  2. on n’est pas prêt à les laisser se noyer mais la baisse des effectifs va continuer
  3. la prochaine réforme sera l’occasion de « finir le job ».

 Les mesures à prendre pour éviter la noyade sont claires :

  •  clarifier vraiment une fois pour toutes, sans que cela change tous les cinq ans, les missions respectives des échelons régionaux et départementaux.
  •  donner vraiment les moyens de fonctionner aux deux échelons par un recrutement massif de personnel permettant d’assurer les missions.